Dans le premier volet de notre enquête sur le topage publié en juillet dernier par Marie Torti fondatrice et dirigeante de Ikitop, nous avions exploré, et pour beaucoup d’entre nous découvert, ce métier étonnant de topeur/topeuse.
Dans ce second volet, nous vous proposons de découvrir plus précisément comment acquérir la maîtrise du topage, au-delà de l’irremplaçable expérience terrain. Ce métier requiert de toute évidence une expertise qui se renforce au fil des différents topages réalisés, des connaissances techniques acquises auprès des pairs, des divers formats vécus… et des difficultés rencontrées.
Comme le lecteur pourra le constater, une vidéo complète ce dossier. Il s’agit des principaux extraits d’une interview riche et passionnante de Jean-Benoît Fournier, l’une des grandes figures de ce métier[1].
Maîtriser le topage
On compte aujourd’hui environ une petite centaine de topeurs en France, un nombre qui n’a cessé de croître en se professionnalisant, notamment grâce aux deux journées dispensées une fois par an à l’Institut supérieur de l’Événement. Créé en 2015 par cet institut en collaboration avec Jean-Benoît Fournier, il s’agit d’un module dispensé sur deux jours, intenses et nourris d’exemples concrets. Cette formation accélérée propose un partage de l’expérience du formateur qui s’appuie sur ses multiples expériences.
Pour y accéder et en tirer profit, l’idéal est d’avoir une première expérience dans le secteur événementiel, que l’on soit chef de projet, directeur technique, régisseur, directeur de production, voire responsable d’agence. Car en aucun cas, on ne devient topeur en 2 jours !

Cf https://www.linstitutdelevenement.fr/formation-continue/maitriser-le-topage/
Le parcours et le profil de chaque topeur sont en effet uniques. Chacun arrive avec ses aptitudes, ses références, son passé. C’est pourquoi le métier s’acquiert réellement avec le temps, l’expérience terrain, le réseau, sur des compétences complémentaires basées sur la technique et le relationnel. Certains se spécialiseront dans le spectacle, d’autres les événements sportifs, ou encore le corporate B2B, les défilés de mode…Tous les bons topeurs ont en commun une rigueur dans le travail, une écoute indispensable, une bonne gestion du stress. Sans oublier la maîtrise des fondamentaux d’Excel. Ce métier, c’est un aboutissement !

Innover, c’est évoluer !
La manière de toper ne cesse d’évoluer, grâce aux nouvelles technologies et aux nouvelles méthodes de travail. Différents logiciels de gestion du temps sont apparus (cuepilot, timecode system, show flow…), en lieu et place (ou pas !) du bon vieux chronomètre.
Le logiciel LIVE EDIT, créé par Julian Guttierez pour les gros shows télévisés, a ainsi été utilisé et adapté pour la Cérémonie d’ouverture des JO de Paris 2024. Ce choix a nécessité plusieurs semaines de réflexion pour adapter le logiciel existant à ce show millimétré : tous les ordres ont été encodés afin d’être modifiables à la seconde près, au gré des imprévus et des décalages éventuels entre les tableaux, entre les bateaux (20 secondes par délégation, ni plus ni moins), mais aussi au gré de la météo…
La time line ressemblait plus que jamais à une partition d’orchestre symphonique, une vingtaine de lignes à suivre en parallèle, notamment pour le master topeur.
Un canal intercom dédié a été mis en place, appelé Radio topage, reprenant les tops essentiels (sur 600 tops à donner en tout). Ce canal était réservé à la production, aux services de la préfecture et à toutes les personnes impliquées et ayant besoin d’un retour en direct sur le show… pour s’assurer que tout se déroulait bien comme prévu.
Autre point essentiel : l’organisation des postes de travail de chaque topeur a été pensée en amont, pour qu’ils puissent suivre en temps réel le déroulé, avec les bons axes caméras, les angles indispensables à la fluidité de l’ensemble.

Réaliser le vivant
Vous trouverez ici un extrait de l’interview de Jean-Benoît Fournier, expert topeur, publiée sur le site de l’association des Freelances de l’événementiel.
Jean-Benoît Fournier a créé en 2012 Conduites Accompagnées, devenu un réseau de topeurs professionnels indépendants, à même de répondre aux besoins des agences et annonceurs[2]. Il a ainsi grandement contribué à faire connaître le métier et son rôle crucial dans la réussite d’un événement.
Gestion du stress, gestion du temps, même combat !
Scripter n’est pas toper
Ces deux métiers – scipteur et topeur – bien distincts se côtoient parfois sur un même événement, d’où la confusion fréquente entre les deux.
On pourra dire que la scripte – c’est encore un métier qui se conjugue au féminin, travaille pour deux domaines de prédilection : le cinéma et la télévision. Sur un événement, elle accompagne le réalisateur lorsqu’une captation/diffusion est prévue. Son rôle est d’anticiper les plans de caméra en fonction de ce qui se déroule sur scène, qui va parler, à quel endroit de la scène, avant ou après telle vidéo, s’il y a un ou plusieurs speakers, qui monte sur scène. En lien avec le topage qui garantit le rythme et le déroulé, la scripte est l’œil du réalisateur. Elle l’assiste et prépare les cadreurs.
Le/a topeu(se)r est la personne qui « réalise le vivant », pas les images. Seul décideur en régie, il donne le tempo, garantit le bon déroulé du direct.
Géographiquement, qui est où ? Le poste de topage se retrouve en général aux côtés des techniciens son et lumière, idéalement avec vue sur la scène. L’espace réalisation est quant à lui souvent situé hors plateau, derrière la scène, voire même dans une régie déportée ou un car.
Alors, qui est prêt à se lancer dans le grand bain du topage ?
Les Freelances de l’Événementiel
Créée par un petit groupe lors du premier confinement en mai 2020, cette association réunit aujourd’hui tous les métiers de notre secteur et notamment des topeurs. Forte de 700 adhérents, elle est devenue une voix qui compte dans l’écosystème événementiel. L’un de ses principaux objectifs : mettre en lumière les métiers de l’ombre, selon 3 axes de travail : former un réseau social professionnel, représenter, promouvoir et valoriser nos métiers, mettre en place des outils, services et actions pour protéger les freelances et défendre leurs intérêts. Sur 128 métiers recensés par ses soins, l’association a publié des fiches détaillées sur 51 d’entre eux, dont le topage.
Pour en savoir plus : https://freelances-evenementiel.org/project/topeur/
[1] L’intégralité de cette interview peut être visionné en suivant ce lien : https://www.youtube.com/watch?v=_VH1bU1PmoU