A première vue, le Salon et l’école n’ont que peu de choses en commun. Pourtant, l’un comme l’autre se construisent sur des interactions sociales, des dynamiques d’échange et le recours à une certaine créativité au service d’un apprentissage prodigué à des publics finaux. Malgré les différences entre ces deux univers, certaines logiques coexistent et mettent en exergue l’universalité de la créativité. Qu’elle soit au cœur d’un processus de formation éducative ou cachée dans les allées du Salon, la créativité est le ciment d’un rapport au savoir.
La création d’une offre
Pour une formation professionnelle comme pour un salon, il est essentiel de proposer un traitement pertinent qui s’inscrit dans les problématiques contemporaines et futures de sa filière. Chaque école ou lieu de formation propose un programme à ses étudiants, un programme parfois axé autour de sujets spécifiques ou bien, comme pour la CASA93(1), autour de projets à construire. On leur apprend donc des techniques et des usages grâce à la possibilité de pouvoir les appliquer directement dans des projets concrets. C’est une année entière qui est construite autour d’un fil rouge afin de guider au mieux les étudiants. Le but est de donner aux élèves les outils nécessaires à la création et au développement de leur univers créatif, un univers qui les accompagnera plus tard lors de leur évolution professionnelle.
Cette volonté de maximiser les avantages futurs existe aussi dans le milieu du Salon. En effet, les visiteurs ne visitent pas un salon pour découvrir ce qu’ils connaissent déjà, ils viennent y découvrir des possibilités, des innovations, les produits et concepts qui rythmeront leurs avenirs. Si on prend l’exemple des salons de mode, ceux-ci doivent être en parfaite synergie avec les tendances actuelles et futures. Mais il ne faut pas oublier la pertinence d’un fil rouge et d’une programmation réfléchie. La CASA93 offre une nouvelle vision éditoriale des programmes scolaires qui pourrait très bien s’adapter au salon. Au lieu de présenter des sujets ou des thèmes dans leur individualité, pourquoi ne pas les mettre en avant en les connectant les uns aux autres au travers d’un projet commun, d’une mise en scène collective.
« Les visiteurs ne visitent pas un salon pour découvrir ce qu’ils connaissent déjà, ils viennent y découvrir des possibilités, des innovations, les produits et concepts qui rythmeront leurs avenirs. »
L’assurance d’une offre pertinente passe pour certain à travers un processus de sélection rigoureux et réfléchi. Dans la grande majorité des offres de formations, il existe une sélection. Qu’elle se fasse sur un relevé scolaire, la motivation, l’expérience, etc., cette sélection permet aux formateurs de retenir les profils qui leur paraissent correspondre le mieux aux enseignements délivrés. Certains salons pratiquent aussi cette sélection, mais celle-ci s’effectue sur les exposants. Par exemple, le salon Première Vision sélectionne ses exposants selon les tendances du secteur de la mode pour offrir une offre adéquate. De son côté, le salon Les Nouveaux Créateurs sélectionne ses exposants grâce à un processus rigoureux, un peu comme la sélection des étudiants pour une nouvelle promotion. En effet, pour pouvoir participer à ce salon, il faut être repéré par les organisateurs du salon ou ses partenaires, ou déposer un dossier qui sera ensuite étudié par un jury. D’autres, enfin, sélectionnent aussi le public final. Pour un salon comme pour une école, cette sélection permet de s’assurer la bonne transmission des informations. Où quand la démarche qualitative de départ devient l’une des conditions du succès.
La création d’un échange
Une fois que tous les acteurs ont été sélectionnés, il faut alors créer une atmosphère d’échange. Que ce soit entre un professeur et un étudiant ou un exposant et un visiteur, le dialogue et l’expression sont au cœur de ces transactions d’informations. Le visiteur comme l’étudiant sont à la recherche de quelque chose, parfois des outils ou des produits mais aussi plus généralement des connaissances. C’est pourquoi l’école et le Salon sont tous deux des éléments de mise en relation, des créateurs de liens humains et sociaux. Et ce lien se crée le plus souvent grâce à une logique de storytelling : la création d’un univers autour des valeurs portées par le projet, que ce soit une formation inclusive comme la CASA93 ou un salon qui veut porter ses valeurs et son identité auprès de son public.
« Il suffit alors de faire preuve d’un peu de créativité pour faire correspondre deux besoins, souvent un besoin d’apprendre et un besoin de partager, pour poser les bases d’un lien solide et stimulant. »
Cet échange n’est pas seulement une transmission de contenu, mais plus exactement la création d’une relation à long terme entre deux individus qui ont beaucoup à apprendre l’un de l’autre. Il suffit alors de faire preuve d’un peu de créativité pour faire correspondre deux besoins, souvent un besoin d’apprendre et un besoin de partager, pour poser les bases d’un lien solide et stimulant. Dans une école ou une formation, comme la CASA93, on cherche à développer le potentiel créatif des étudiants au travers de projets, dans lesquels ils sont accompagnés par des intervenants bénévoles. Ici, la relation entre professeur et étudiant est réinventée, on exclut la dimension hiérarchique de ce lien pour mettre à égalité le besoin d’apprendre de l’élève et les connaissances du formateur. On donne à l’étudiant les clés de son inspiration, sans lui donner les réponses mais en l’invitant à trouver lui-même la solution.
C’est ce même processus qui est appliqué dans certains salons. A la Paris Games Week par exemple, certains exposants mettent en place des stands entièrement immersifs qui réinventent l’expérience du visiteur et stimulent la relation entre exposant et client. Dans le Salon comme à l’école, l’acquisition de nouveaux savoirs doit s’effectuer de façon ludique au cœur d’une expérience sociale et créative en mettant l’accent sur la notion de « faire ».
Une école comme la CASA93 a pour vocation d’accompagner et de mettre en scène la créativité de ses étudiants, de libérer leur expression. Cela intervient au travers d’outils propices au développement de la créativité tel que le moodboard(2). Cette logique créative et innovante, ici sous la forme d’exercices d’expression et de libération de créativité, peut être appliquée dans le milieu du Salon pour ses différents acteurs : qu’ils soient organisateurs ou exposants. Par exemple, les étudiants de la CASA93 ont, à la fin de leur étude, l’opportunité de présenter leurs créations, le fruit de leur travail, lors d’un défilé. Pourquoi ne pas permettre aux exposants d’un salon de mettre en scène leurs produits à la fin d’un salon, que ce soit au travers d’une exposition collective, d’une immersion grandeur nature, etc. Les organisateurs de salons pourraient, à l’instar d’un professeur, guider et accompagner les exposants dans l’expression de leur créativité, et peut-être transformer le Salon en moodboard à part entière.
La création d’une histoire
L’information est au cœur à la fois des formations et des salons. La seule différence, peut-être, est la façon qu’ont chacun de la partager. Si le Salon peut user de l’aménagement spatial pour transmettre un message ou créer un parcours personnalisé pour ses visiteurs, l’école, quant à elle, doit souvent faire preuve de créativité pour innover dans un espace plus contraint. Mais pour l’un comme pour l’autre, c’est l’interaction qui est essentielle. Dans un salon, les visiteurs ont l’opportunité d’interagir et de réagir directement via une application par exemple ou des tables ronde, comme le font les élèves d’une classe en adressant directement leur professeur. Et alors le salon comme le professeur peuvent user de ces retours et interrogations pour créer une expérience améliorée.
Dans le Salon, comme dans une formation, l’expression et l’épanouissement de ses publics et le développement de leur potentiel créatif, remplaçant les élèves sur les bancs de l’école, devient le point central d’une harmonisation de savoirs réussie. Et si à l’école on œuvre à donner à chaque étudiant la possibilité de raconter son histoire, c’est sur les Salons que, parfois, elles sont racontées.
Sources :
(1)La Casa 93 est la petite sœur de la Casa Geração Vidigal, école de mode née en 2013 à Vidigal, favela de Rio de Janeiro. C’est la première école de mode française à être gratuite pour les jeunes issus de quartiers prioritaires. Casa93 est une opportunité de se former dans la mode et d’avoir accès à ce monde et à ses métiers tout en donnant au milieu de la mode l’opportunité de travailler avec des jeunes qui ont une créativité et des capacités extraordinaires. Pour plus d’informations, https://www.casa93.fr
(2) Un moodboard, ou planche de tendances, est un assemblage d’images, d’objets ou de mots qui est utilisé pour exprimer le style choisi dans le cadre du développement d’une idée créative (concept produit, publicité, design, agencement, etc.). Le moodboard peut être utilisé par un créatif ou un designer pour montrer l’orientation ou l’univers thématique de son travail de création. Le moodboard peut prendre la forme d’un collage sur un mur, d’un regroupement d’objets ou d’un assemblage numérique envoyé aux personnes concernées.