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L’image de marque au cœur de la stratégie événementielle

Charlotte Paroielle

Charlotte Paroielle

Directrice de création digitale chez Le Figaro

Sommaire

Pour comprendre le processus de création d’une image de marque et son développement, nous avons rencontré Charlotte Paroielle, Directrice artistique du Monde pendant 6 ans. A travers l’événement O21 (autour de l’orientation) du célèbre média, elle questionne la fonction véritable d’une identité de marque et sa progression dans un contexte permanent d’évolutions et revendications sociales.

Pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre parcours ?

J’ai obtenu un diplôme de l’École Supérieure Estienne des Arts et des Industries Graphiques, spécialisation typographisme. J’ai ensuite passé une licence lettres et arts à l’Université parisienne Denis Diderot durant laquelle j’ai intégré en alternance une agence de communication globale. Puis, après une courte expérience en tant que Web Designer à Roubaix, j’en ai intégré une seconde. Il y a 6 ans, j’ai finalement rejoint l’équipe du groupe Le Monde comme Directrice artistique. Mon travail est de réfléchir à l’image des différentes campagnes de communication, quels que soient les supports.

Quelles observations faites-vous sur la filière salon et en quoi o21 diffère-t-il d’un salon traditionnel ?

Selon moi, les salons devraient mettre en avant l’expérience visiteur à travers des opérations très simples. Avant l’événement, cela passe par la campagne de communication. L’année dernière, nous avons par exemple entrepris de moderniser et différencier les identités des salons de l’éducation par rapport à la concurrence et de créer une charte graphique pour qu’ils soient identifiés comme les salons du Monde via les affiches et tous les autres supports. L’objectif étant de rajeunir l’image pour que la communication soit réellement adaptée à la cible. Pendant l’événement, je conseille de ne pas amasser les stands et d’aménager des aires de respiration qui rendront la visite plus confortable. L’espace, la gestion du trafic, le sens de circulation, etc. tout devrait être réfléchi avec des designers d’expérience, comme sur le web, pour le rendre plus attractif.

O21 « s’Orienter au 21 siècle »  a été conçu pour aider les jeunes à trouver leur voie et choisir leur orientation en considérant tous les enjeux du monde professionnel actuel. Mais ont-ils vraiment envie, en 2018, de s’informer dans un salon ? Le mot « salon » dérange en lui-même. Il nous a donc semblé important de s’émanciper des codes du salon d’orientation traditionnel, en créant un événement moderne et dynamique, qui répond mieux aux attentes de cette nouvelle génération. Nous avons fortement encouragé l’interactivité au sein du salon, en proposant par exemple des conférences sur un thème comme « choisir » ou « inventer » son futur métier, où des intervenants racontent leur expérience. Le débat est mené par deux journalistes (un sur scène et un dans le public). Les jeunes pouvaient poser leurs questions via leur smartphone, et le journaliste présent les lisaient ensuite à voix haute aux speakers. Cela a permis de libérer la parole.  Nous avons travaillé à une vraie mixité de formats.

Où puisez-vous votre inspiration ?

Pour connaître les goûts, préférences et besoins de ma cible, je fais beaucoup de veille sur Pinterest et Instagram qui sont de formidables outils d’inspiration dans l’univers de la typographie et du graphisme. D’une manière générale, je consomme beaucoup d’images, au cinéma ou expositions. Et lorsque je suis en panne d’idée, je préfère aérer mon esprit et penser à autre chose. Cela ne sert à rien de s’acharner, le créatif a aussi besoin de temps sans créer.

« Cela ne sert à rien de s’acharner, le créatif a aussi besoin de temps sans créer. »

Quel est le processus de création d’une image de marque, et comment la faire perdurer dans le temps ?

Pour commencer il faut mettre des mots sur ses idées. Un brief oral avec le client est la première étape essentielle à la création d’une image de marque. Il n’existait pas de précédent à la typologie d’événement comme O21, au croisement entre salon, conférence TED et workshop. Nous ne pouvions donc pas nous inspirer de ce qui a été fait auparavant, ce fut la principale difficulté rencontrée lors de la création de cet événement. Une fois le brief effectué, nous réalisons un benchmark dans le secteur en question et dans d’autres domaines voisins. Toute l’équipe fait ensuite beaucoup de propositions créatives ! Nous sélectionnons les meilleures (sans excéder le nombre de trois) à présenter au client. Une campagne de communication se réfléchit pour être en accord avec l’identité de marque. Pour les deux, je peux travailler sur mon ordinateur ou passer par une étape de dessin sur papier.

Le second défi est de faire perdurer la marqueLe Monde existe depuis plus de 75 ans et le public est habitué à son identité graphique forte, notamment grâce au logo très reconnaissable. L’objectif est donc double : développer et assoir l’image de marque, sans bousculer les codes visuels, repères du public. Il ne s’agit en aucun cas de la déconstruire, mais bien de la faire évoluer avec son temps.

L’événement est un moyen d’ancrer son image de marque. Faut-il s’attacher à des valeurs particulières pour la faire évoluer, dans un contexte de revendications sociales fort ?

Nous utilisons les événements pour partager nos valeurs, le sérieux et l’expertise du journal. Ils portent l’image dynamique du groupe et créent le lien avec un public très diversifié. Le Monde organise par exemple différents festivals ainsi que des rassemblements plus intimes comme des forums de philosophie, un prix de l’économie, etc. Pour toucher les plus jeunes, des diffusions d’épisodes de séries en avant première sont programmées, ainsi que des conférences dans les écoles sur des thèmes de société.

Pour se développer, il faut être attentif aux évolutions de la société et avancer avec elle. Dans le cadre d’un festival de journalisme organisé par le groupe, le mouvement #MeToo[1] a par exemple été abordé en questionnant la prise de position des médias, la perception du public et même la place de l’homme aujourd’hui. Ce type d’opération doit en revanche toujours rester fidèle aux valeurs réelles portées par l’entreprise : il ne faut pas trop s’en éloigner, au risque de décevoir son public.

(1)Le mouvement #MeToo est un hashtag qui s’est largement diffusé en octobre 2017 sur les réseaux sociaux pour dénoncer le harcèlement et les agressions sexuelles.

À propos de l'auteur

Charlotte Paroielle

Charlotte Paroielle

Directrice de création digitale chez Le Figaro

Diplômée de l'école Estienne en Typographisme, Charlotte Paroielle débute sa carrière comme Directrice artistique en agence de communication. Il y a 5 ans, elle se spécialise dans la communication des médias et rejoint le journal Le Monde. Elle y a conçu les campagnes de communication et identité de la marque Le Monde dont notamment celle d'événements comme Le Monde festival, O21 ou encore les salons éducations. Elle est aujourd'hui Directrice de création chez Le Figaro.

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